vendredi 11 mai 2012

Phoenix Tong Tiang Xiang - Hojo Tea






Tong Tiang Xiang : "le goût qui va jusqu'au paradis", tout un programme...


Cela faisait un moment que j'avais sorti ce sachet de thé de son rangement, que je le regardais, qu'il me faisait de l'oeil. Il s'agit du deuxième Phoenix Oolong par ordre de prix, si ce n'est de qualité, dans la sélection d'Akira. 50€ les 15g au prix d'aujourd'hui, soit ici un peu plus de 15€ la dégustation. Ce n'est pas donné, mais la question est justement de savoir si ça les vaut, si ce genre de thé mérite de se limiter en quantité au profit de la qualité. Je vous le dis tout de suite, en ce qui me concerne, la réponse est oui. Et puis c'est dimanche... 








Je vais faire attention aux paramètres, c'est aussi pour cela que j'ai bu les Dan Cong d'Akira dans l'ordre croissant de qualité - aussi suite à ses conseils - histoire d'être habitué à préparer ces Dan Cong frais, non torréfiés. Une préparation légèrement différente par rapport à leurs confrères plus fortement oxydés et torréfiés peut être justifiée. Ou non, c'est chacun qui voit. En fait, la préparation n'est pas compliquée, à condition de respecter quelques principes de base : eau adaptée, compatibilité voire neutralité du matériel, bon ratio de feuilles et température max. 








5g donc dans mon plus petit zhong. Le zhong de la maison des 3 thés est peut être un peu plus petit mais ses parois très fines ne gardent pas la chaleur très longtemps. C'est bien pour certains thés, mais je préfère celui en "bone china" (porcelaine à la cendre d'os) de Mandarin's Tearoom qui est parfait : dense, il garde longtemps la chaleur. C'est mieux pour moi qui ne me précipite pas pour boire mes tasses. 

La chaleur max est importante, comme très souvent pour les Oolong et particulièrement au début pour ouvrir les feuilles. C'est donc eau bouillante, ici Mont Roucous chauffée en bouilloire inox et transférée en bouilloire en verre et gardée à faible ébullition pendant la dégustation, en rajoutant de l'eau fraîche de temps à autre. Enfin, j'utilise un pot de réserve en verre et deux tasses en porcelaine de Jingdezhen, tournées et peintes à la main, bref du bon matos très agréable à utiliser. 




deux formes différentes pour deux nez différents...




Les feuilles sèches puis humides dégagent des senteurs de rêve. Douceur. Rien d'agressif. Pas de fausse note. Complexe aussi. J'ai bien du mal à trouver des analogies. C'est exotique, frais, sucré, gourmand. Pêche, agrumes. Des fleurs. Les inspirations renvoient directement au fond de la gorge. Pas de doute possible... 

Première infusion flash, aussi pour re-préchauffer le zhong car j'ai passé pas loin de 5 min à sentir les feuilles... Du coup la liqueur est légère, mais elle ne cache en rien pour autant ce qui va se passer. Un thé de qualité n'a pas besoin de passer mille ans à infuser pour qu'on ressente son aftertaste. Une poignée de secondes suffit. La liqueur obtenue n'aura peut être pas énormément d'intensité, mais l'aftertaste lui sera bien là. Ici, cette première infusion très légère apporte de la fraîcheur dans tout le système respiratoire. C'est comme si la gorge se faisait plus large, qu'on vous avez débouché le nez. Je sens également les effets de ce thé, une légère ivresse. La suite promet... 




après rinçage...




J'infuse très court aussi la deuxième car je trouve intéressant ce genre de liqueur. On boit. Sur le coup, pas grand chose. Presque pas de goût. Et au bout d'un laps de temps plus ou moins long, le fruit arrive. Ça m'a toujours éclaté avec ces thés. Kiwi, banane, pêche, abricot, c'est fantastique. Avant, j'infusais comme un bûcheron. Maintenant, c'est l'inverse. Il est fort probable que je glisse vers la voie du milieu avec le temps, on verra...

Je commence aussi à me dire que j'ai confondu par le passé la rémanence en bouche des saveurs due à l'astringence, et l'aftertaste à proprement parler (Hou Yun). Une liqueur très tannique comme un vieux puerh, ou un vin, va laisser un goût dans la bouche qui pourra rester longtemps du à leur acidité voire leur degré d'alcool dans le cas du vin ou d'un autre spiritueux. Mais je ne pense pas qu'on puisse parler d'aftertaste dans ce cas-là. C'est le problème de traduire "aftertaste" par "longueur en bouche". Ce genre d'hypothèse est à confirmer néanmoins.








On continue. Je pousse un poil plus, mais pas trop, disons 10 bonnes secondes, histoire de donner un coup de pouce à l'ouverture des feuilles. Le parfum est discret. Akira me confiait que pour beaucoup de personnes, les arômes étaient le critère prédominant. Les Phoenix Oolong sont des thés qui peuvent émerveiller par leurs parfums très exotiques et complexes. Mais voilà, autant il est facile de trouver un Phoenix Oolong avec un parfum superbe, autant en trouver un qui aura de la profondeur et une longueur correctes sera une autre paire de manche. Il en sera de même pour les TGY, les thés verts, etc. Autant il faut se fier à son nez comme vu précédemment, autant il faut aussi faire attention aux informations qu'il nous délivre. 

A contrario, un thé qui ne sent pas grand chose ne sera pas forcément dénué d'intérêt. Quand j'ai senti pour la première fois le Tsukigase Zairai à côté d'autres thés, je l'ai trouvé discret. Mais en réalité chaque inspiration renvoyait tellement profondément dans la gorge que mon nez s'est fait avoir. 








La suite de ce thé est à l'image du début. Énormément de finesse. Il m'a calmé, relaxé. J'ai poussé plus sur la fin. Me sont apparues des notes plus citronnées ce qui ne fut pas pour me déplaire, du melon aussi. Jamais acide, amer, astringent. C'est pur, qu'importe la façon dont on le pousse. 

Comme observé auparavant, et confirmé par quelques dégustations en Malaisie,  je ne pense pas que les thés de ce niveau se distinguent de façon très évidente. Il faut être attentif et avoir l'habitude. Un néophyte ne sera pas à même de relever toutes les finesses d'un grand vin pour prendre un exemple similaire.

Pour finir cette description, je noterai que plusieurs heures après la dernière tasse, je sentais encore la présence fruitée de ce thé en bouche. 








Voilà donc pour cet avant dernier Phoenix Oolong sur l'échelle des prix d'Akira. Il bat dans ma tête le Ya Shi Xiang bien que plus discret. Il me reste à boire le Mi Hua Xiang, médaille d'or. Je le connais, mais je sens que ce sera encore un voyage...




"Dan Cong" calligraphie offerte par un ami. Merci encore...




À bientôt !


9 commentaires:

  1. Dis donc ! Que de belles choses ici contées...
    Quelle ambiance chaleureuse dans ces clair-obscur...

    Que veux-tu dire par la photo sur laquelle on voit le couvercle noir de ta Nosaka ?

    Superbe cette tasse haute de Jingdezhen !

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  2. A la lumière de ce Thé quelle magnifique lampe & porcelaines.
    En ce qui concerne le couvercle de la Nosaka cher Lionel c'est juste histoire faire trempette dans la tasse afin d'y voir les effets et l'apport sur l'eau et la liqueur.C'est d'ailleurs stupéfiant de saisir ce moment ou même sur l'eau il y a arrondissement de l'eau selon la terre(plus ou moins de minéraux,fer ions...)et qui va devenir plus douce moelleuse ou presque sucrée...Reste à y ajouter les feuilles et l'histoire du gout peut alors exploser.J'en ai fait de même avec mon couvercle Red Clay Shimizu Ken mamuyi et c'est fascinant d'effet sur l'after taste et la profondeur de l’arôme du thé comme une chaleur dans la gorge un foulard en soie de Thé aromatique.
    Bien à Vous.

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  3. Tout d'abord , quelles photos magnifiques! Les couleurs de l'avant dernière sont particulièrement belles!

    En ce qui concerne le Dan Cong, ta description donne vraiment envie de le découvrir. Le Ya Shi Xiang est de loin le meilleur thé que j'ai pu goûter dans ma vie ... celui-ci éveille donc cruellement ma curiosité ! à essayer un jour ...

    Et enfin, merci pour tes articles où tu partages tes leçons apprises d'Akira, c'est vraiment très intéressant.

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  4. Merci pour ce magnifique descriptif d'un thé que je n'ai pas encore eu l'occasion de savourer !
    L'approche zhong me plait beaucoup pour ce genre de thés, je me reconnais bien là.

    Et d'ailleurs le tien est somptueux, d'ou provient-il ?

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  5. Bonjour,

    Le seul Tong Tiang Xiang que j'ai goûté provenait de la Maison des Trois Thés. Son prix avoisinait le prix de celui-ci.
    Hormis ses qualités exceptionnelles en bouche, ce qui nous a particulièrement marqués, moi et l'ami qui m'accompagnait lors de la dégustation, c'est l'immense fatigue qui nous a envahit peu après son ingestion. Nous en avions presque les jambes coupées !
    Par la suite, je regardais la boite de ce Dan Cong d'un oeil craintif.

    Lors d'une nouvelle dégustation, quelques mois plus tard, cette effet avait disparu (en même temps que plusieurs qualités du thé d'ailleurs).

    C'est étrange, et assez incroyable, l'effet que certains thés peuvent avoir sur le corps.

    Encore bravo pour cet article, documenté par de magnifiques photos.

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  6. Oups,
    Excusez les fautes de grammaire.
    Quand on veut faire vite...

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  7. Merci à tous. Ce fut une superbe session de thé pleine de simplicité et de bonnes surprises.

    Ce zhong est celui de Mandarin's Tearoom, ou plutôt l'ancien car il est épuisé. Un nouveau devrait arriver au jour, mais pas le même, un en porcelaine bleue Qingbai.

    Merci Philippe pour les explications. L'apport d'une terre comme la Nosaka (cuit en réduction ici) sur l'eau est stupéfiante. Sur le thé bien évidemment aussi, c'est toute la texture qui est changée. C'est comme un mini filtre passe-bas sur les saveurs mais qui amplifie la longueur.

    Pour les thés qui font un effet notable sur le corps, c'est incontestable. Quand je bois mon thé, en général je suis assis donc ne m'en rend pas toujours compte, mais il suffit de se lever pour constater que quelque chose est différent.

    Quant aux thés qui se gâtent avec le temps, il faut voir son degré de torréfaction.. S'il ne l'est pas du tout, comme celui-ci, il fut prendre des précautionporcin d'éviter qu'il ne s'oxyde et donc, si possible, le conserver à l'abri de l'oxygène. C'est pourquoi Akira les emballe sous vide avec des sachets qui enlève la petite quantité d'oxygène restante.

    Si le thé est torréfié, a priori c'est moi grave. Les effets s'estompent avec le temps, ce qui peut être vu comme une bonification suivant les goûts.

    Enfin, le Ya Shi Xiang est vraiment un beau thé, un bel exemple d'un bon dan cong frais. Celui là est plus sur la finesse, avec une classe incroyable.

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  8. Magnifique billet, aussi bien sur le fond que sur la forme. Ça devient vraiment pointu, je décroche un peu car je prends vraiment conscience que nous n'avons as du tout les mêmes facultés de dégustation.

    "j'ai confondu par le passé la rémanence en bouche des saveurs due à l'astringence, et l'aftertaste à proprement parler"

    Voilà, je dois en être là. J'y resterai peut-être d'ailleurs, mais là n'est pas l'important, il y a autant de façons de vivre le thé, de le boire et de l'apprécier que d'individus. Quant à ce dan cong, il ne fait aucun doute que je ne saurais pas l'apprécier à sa juste valeur. Ce qui ne m'empêche pas de me délecter de la lecture de ce style d'articles, surtout lorsqu'il sont aussi superbement illustrés !

    Pour revenir sur l' "aftertaste", également par rapport à ton article précédent, je dois dire que je n'ai toujours pas l'impression d'avoir bien saisi de quoi il s'agissait. C'est sans doute le genre de chose qu'il est difficile d'expliquer et que l'on doit expérimenter par soi-même pour bien cerner la chose... wait & see !

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  9. Honnêtement, je serais sur à 100% de ce qu'est que cet aftertaste, je l'aurais défini depuis le début, mais la traduction pose des problèmes.

    Quality of tea is defined by the depth of taste and flavor. In Chinese it is called Hou Yun. “Hou” means throat and “Yun” means” lasting lingering charm. Hou Yun means the taste that is felt on our throat and lingers. In English, I cannot find an appropriate term to describe this feeling. Perhaps the closest term to describe this feeling is “aftertaste”, “depth of taste” or “long finishing”.

    Donc longueur en bouche ne couvre pas exactement cette notion, de même qu'aftertaste est une mauvaise traduction. On parle des sensations au niveau de la gorge et pas des papilles.

    "j'ai confondu par le passé la rémanence en bouche des saveurs due à l'astringence, et l'aftertaste à proprement parler"

    Je ne suis pas sûr de moi à 100%, mais je crois qu'il y a plusieurs sortes de longueur en bouche, dont une au moins qui ne se situe pas au niveau de la gorge. C'est de ça que je voulais parler. Si on doit dire que l'aftertaste est ce fameux critère de qualité des thés (toujours d'après les propos d'Akira) alors il faut être précis et exclure ce qui n'en fait pas partie..

    Bref, le but est toujours de boire les thés qu'on aime... Et effectivement, c'est plus facile à cerner quand on te le montre...

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